Les économistes ont depuis longtemps intégré les crises dans leurs schémas et leurs modèles d’analyse. Ils savent que la vie n’est pas un long fleuve tranquille. Pire encore, parfois ils s’attendent à des terribles chocs qui menacent les fondements des sociétés modernes.Les crises de 1929, 1974, 1982, 1987 sont présentes dans les esprits et ont laissé des traces indélébiles dans les écrits et les pratiques de politiques économiques. Mais à chaque fois, l’économie de marché a su faire face à ces difficultés en innovant. La crise de 1929 a eu pour conséquence l’émergence de la théorie keynésienne et sa thérapie légendaire basée sur le déploiement massif de dépenses publiques pour corriger les récessions et le chômage.
Les crises de 1974 et 1982 (Stagflation) ont montré, après maintes expérimentations, que le meilleur remède était d’extirper l’inflation du système d’abord puis de booster les dépenses publiques par la suite. Nous allons mettre de côté les analyses techniques de délais, d’efficacité relative des différents instruments, les débats d’écoles pour nous concentrer sur l’essentiel.
La récente crise entame sa cinquième année sans pour cela donner des signes encourageants de reprises durables. Certes, la crise de 1929 a duré plus d’une décennie. L’économie mondiale finira par s’en sortir, même si c’est pour acheter une paix sociale qui va durer quelques années, pour constater encore une fois de plus la résurgence de pressions récessionnistes avec leurs lots de maux sociaux, comme le chômage et l’accroissement de la pauvreté dans tous les pays.
La récente crise entame sa cinquième année sans pour cela donner des signes encourageants de reprises durables. Certes, la crise de 1929 a duré plus d’une décennie. L’économie mondiale finira par s’en sortir, même si c’est pour acheter une paix sociale qui va durer quelques années, pour constater encore une fois de plus la résurgence de pressions récessionnistes avec leurs lots de maux sociaux, comme le chômage et l’accroissement de la pauvreté dans tous les pays.
Mais force est de constater que la crise mondiale fait preuve d’une résistance farouche face aux timides tentatives de l’éradiquer. Pourquoi les crises (actuelles et futures) risquent d’être de plus en plus longues et de plus en plus coriaces. Nous allons lister les causes essentielles, sans pour cela prétendre à l’exhaustivité.
Les mutations structurelles de l’économie mondiale
Les institutions internationales ne cessent de réviser à la baisse les prévisions de croissance de l’économie mondiale. En 2010, on tablait sur une croissance économique mondiale de 3,5% pour 2012, aujourd’hui on n’anticipe que 2,6% et on corrigera probablement à la baisse ces données. La plupart de ces performances viendront des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud). L’Europe vieillissante semble incapable de dupliquer à grande échelle la réussite du modèle allemand. Les USA paraissent en situation bloquée : le congrès (républicain) retarde ou modifie profondément toute proposition de la Maison-Blanche dans un jeu politique où les perdants sont les Américains et les pays pauvres.
Mais en fait, qu’est-ce qui a changé pour faire en sorte que la crise perdure plus que nécessaire dans ces pays ? Nous avons plusieurs pistes qui expliquent pourquoi la crise mondiale a développé des anticorps aux remèdes classiques. Nous avons d’abord les aspects politiques et organisationnels :
1. Les Lobbys financiers sont plus puissants que les régulateurs économiques nationaux. Le secteur financier international s’est érigé en arbitre des politiques économiques nationales et internationales pour les orienter selon ses propres intérêts. Les agences de notation dictent des politiques de rigueur en période de récession aux pays endettés. Le court terme l’emporte sur le long terme. Les intérêts des financiers passent avant ceux de la populace. Les USA ont été incapables de mettre sous contrôle le système financier qui devient un puissant levier de création de crises (subprimes) et leur aggravation (dettes souveraines) ;
2. Une économie mondialisée sans chef d’orchestre mondial : les différentes nations ont rétrocédé une grande partie de leurs prérogatives à de multiples institutions sans un centre de coordination efficace. L’OMC, le FMI, la Banque mondiale, Le G7, le G20, la Commission européenne, les différentes organisations régionales, etc. agissent, décident et les institutions et mécanismes de coordination font défaus ;
3. Les enjeux politiques nationaux et internationaux bloquent les réformes mondiales de fond. Les USA et la Grande-Bretagne ne veulent pas taxer les opérations financières spéculatives de peur de perdre le leadership des marchés financiers. Pour ces pays, il vaut mieux prendre quelques gains nationaux plutôt qu’un peu moins tout en suscitant plus de bien-être pour la population mondiale :
4. L’idéologie joue un rôle important dans la perpétuation des crises. L’école libérale extrême semble reculer un peu partout dans le monde. Mais elle a laissé un cheval de Troie très puissant : l’indépendance des banques centrales, sous le prétexte que la monnaie est trop importante pour la mettre entre les mains des politiciens. Mais au moins, ces derniers sont élus démocratiquement, malgré les insuffisances du système. On confie à des bureaucrates des missions trop importantes pour les octroyer à des élus. Ce faisant, on confisque à ces derniers un instrument central pour gérer les crises. Des interventions plus musclées et plus précoces des banques centrales mondiales auraient pu minimiser les impacts de la crise.
1. Les Lobbys financiers sont plus puissants que les régulateurs économiques nationaux. Le secteur financier international s’est érigé en arbitre des politiques économiques nationales et internationales pour les orienter selon ses propres intérêts. Les agences de notation dictent des politiques de rigueur en période de récession aux pays endettés. Le court terme l’emporte sur le long terme. Les intérêts des financiers passent avant ceux de la populace. Les USA ont été incapables de mettre sous contrôle le système financier qui devient un puissant levier de création de crises (subprimes) et leur aggravation (dettes souveraines) ;
2. Une économie mondialisée sans chef d’orchestre mondial : les différentes nations ont rétrocédé une grande partie de leurs prérogatives à de multiples institutions sans un centre de coordination efficace. L’OMC, le FMI, la Banque mondiale, Le G7, le G20, la Commission européenne, les différentes organisations régionales, etc. agissent, décident et les institutions et mécanismes de coordination font défaus ;
3. Les enjeux politiques nationaux et internationaux bloquent les réformes mondiales de fond. Les USA et la Grande-Bretagne ne veulent pas taxer les opérations financières spéculatives de peur de perdre le leadership des marchés financiers. Pour ces pays, il vaut mieux prendre quelques gains nationaux plutôt qu’un peu moins tout en suscitant plus de bien-être pour la population mondiale :
4. L’idéologie joue un rôle important dans la perpétuation des crises. L’école libérale extrême semble reculer un peu partout dans le monde. Mais elle a laissé un cheval de Troie très puissant : l’indépendance des banques centrales, sous le prétexte que la monnaie est trop importante pour la mettre entre les mains des politiciens. Mais au moins, ces derniers sont élus démocratiquement, malgré les insuffisances du système. On confie à des bureaucrates des missions trop importantes pour les octroyer à des élus. Ce faisant, on confisque à ces derniers un instrument central pour gérer les crises. Des interventions plus musclées et plus précoces des banques centrales mondiales auraient pu minimiser les impacts de la crise.
Aspects économiques
Ceci dit, au niveau économique la situation n’est guère reluisante. De nombreuses contradictions minent l’économie mondiale. Elles concernent de nombreux aspects dont nous évoquerons les plus importants :
1. Un modèle de croissance insoutenable : l’expansion des trois dernières décennies a été l’œuvre de pays émergents qui trouvaient des débouchés en Europe, mais surtout aux USA grâce au processus d’endettement national et international. Les citoyens de ces pays s’endettent trop pour acheter des biens produits ailleurs. Les pays finançaient ces déficits de balance de paiement par des prêts externes. Les budgets publics en déficits croissants sont également financés par des prêts externes. L’accumulation des dettes des citoyens et des Etats en Europe et surtout aux USA ne pouvait continuer indéfiniment. C’est là où une institution «centrale aurait pu alerter à temps les gouvernements». Nous avons une économie mondialisée - sans gouvernement mondial - dotée d’une stratégie totalement inopérante à long terme. Si un système est structuré pour se diriger vers une impasse, il ne manquera pas de l’atteindre ;
2. Trop d’erreurs de politiques macroéconomiques ont été faites : intervention trop tardive et trop insuffisante, changements brutaux de priorités entre relance et rigueur. Bien sûr que les différents gouvernements sont entourés d’experts très compétents. Mais les enjeux politiques et les idéologies ne leur permettent pas de mener des actions rapides et cohérentes. L’indépendance relative des banques centrales a été l’une des causes essentielles de l’allongement de la crise en Europe. Alors que la crise des subprimes a commencé ses ravages par l’assèchement des crédits aux PME, les responsables de la Banque centrale européenne disaient qu’ils étaient surtout préoccupés par l’inflation ;
3. Le développement des inégalités s’est propagé dans la plupart des pays développés. A la fin des années soixante-dix, les salaires représentaient plus de 70% des PIB des pays industrialisés. Aujourd’hui, ils représentent moins de 60% (et à peu près 9% pour les profits). Il est beaucoup plus facile de corriger les déséquilibres d’une économie plus égalitaire, plus sociale, plus concertée et orientée vers le bien-être de tous plutôt que de quelques-uns. Les dérapages des inégalités récentes sont l’une des causes les plus importantes de l’inefficacité des politiques économiques de lutte contre les crises ;
4. La superposition de deux crises (subprimes + dettes souveraines) complique la conduite technique des politiques macroéconomiques. La première nécessite une relance (hausse des dépenses publiques) et la seconde requiert la rigueur (baisse des dépenses publiques). Les pays ne savent pas sur quel pied danser. Les solutions à ce dilemme ne sont pas impossibles techniquement, mais le sont politiquement.
1. Un modèle de croissance insoutenable : l’expansion des trois dernières décennies a été l’œuvre de pays émergents qui trouvaient des débouchés en Europe, mais surtout aux USA grâce au processus d’endettement national et international. Les citoyens de ces pays s’endettent trop pour acheter des biens produits ailleurs. Les pays finançaient ces déficits de balance de paiement par des prêts externes. Les budgets publics en déficits croissants sont également financés par des prêts externes. L’accumulation des dettes des citoyens et des Etats en Europe et surtout aux USA ne pouvait continuer indéfiniment. C’est là où une institution «centrale aurait pu alerter à temps les gouvernements». Nous avons une économie mondialisée - sans gouvernement mondial - dotée d’une stratégie totalement inopérante à long terme. Si un système est structuré pour se diriger vers une impasse, il ne manquera pas de l’atteindre ;
2. Trop d’erreurs de politiques macroéconomiques ont été faites : intervention trop tardive et trop insuffisante, changements brutaux de priorités entre relance et rigueur. Bien sûr que les différents gouvernements sont entourés d’experts très compétents. Mais les enjeux politiques et les idéologies ne leur permettent pas de mener des actions rapides et cohérentes. L’indépendance relative des banques centrales a été l’une des causes essentielles de l’allongement de la crise en Europe. Alors que la crise des subprimes a commencé ses ravages par l’assèchement des crédits aux PME, les responsables de la Banque centrale européenne disaient qu’ils étaient surtout préoccupés par l’inflation ;
3. Le développement des inégalités s’est propagé dans la plupart des pays développés. A la fin des années soixante-dix, les salaires représentaient plus de 70% des PIB des pays industrialisés. Aujourd’hui, ils représentent moins de 60% (et à peu près 9% pour les profits). Il est beaucoup plus facile de corriger les déséquilibres d’une économie plus égalitaire, plus sociale, plus concertée et orientée vers le bien-être de tous plutôt que de quelques-uns. Les dérapages des inégalités récentes sont l’une des causes les plus importantes de l’inefficacité des politiques économiques de lutte contre les crises ;
4. La superposition de deux crises (subprimes + dettes souveraines) complique la conduite technique des politiques macroéconomiques. La première nécessite une relance (hausse des dépenses publiques) et la seconde requiert la rigueur (baisse des dépenses publiques). Les pays ne savent pas sur quel pied danser. Les solutions à ce dilemme ne sont pas impossibles techniquement, mais le sont politiquement.
En conclusion, il y a beaucoup trop d’anomalies dans la structure de l’économie mondiale pour qu’elle puisse fonctionner efficacement. Les correctifs à mener sont profonds et nécessitent une chirurgie radicale. La récente débâcle des partis au pouvoir va peut-être inciter les politiciens à mieux restructurer l’économie mondiale. Même en étant optimiste cela prendrait des décennies. En attendant, il faut savoir vivre avec des crises de plus en plus aigües et qui risquent de durer et de créer des situations intenables pour les couches les plus pauvres des pays riches et pour les pays en voie de développement.